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Initiation. Le mot est lâché. Mais est-ce que cette initiation était seulement professionnelle (le droit d'entrer dans un métier et d'engager ensuite le long processus d'apprentissage des savoir-faire et des connaissances nécessaires à la maîtrise dudit métier) ; s'agit-il d'une initiation au sens d'admission aux mystères, d'affiliation, d'admission à un ordre dans son acception ésotérique ? ou bien, enfin, des deux à la fois ? Et, au-delà, y aurait-il eu une sorte de F . . . M . . . du bois à l'image de la F . . . M . . . de la pierre ? En 1747, Charles François Radet de Beauchesne, affirmant détenir ses pouvoirs de Maître de Courval, grand maître des Eaux et Forêts du comté d'Eu, seigneur de Courval, est le promoteur d'un rite maçonnique forestier spéculatif. Selon Jean-Marie Ragon de Bettignies (1781 - 1866), ce rite aurait tenu sa première assemblée - le "Chantier du Globe et de la Gloire" -, à Paris, dans un parc du quartier de La Nouvelle France (actuellement Faubourg Poissonnière) le 17 août 1747. Pour cet auteur, le rituel, qui n'avait pas de caractère judéo-chrétien mais païen, provenait des forêts du Bourbonnais où des nobles proscrits avaient trouvé refuge, puis avaient été initiés par des bûcherons, pendant les troubles qui marquèrent les règnes de Charles VI et Charles VII. D'aucuns estiment que l'initiative de Beauchesne fut prise suite à la création à Londres, le 22 septembre 1717, par John Toland, de l' Ancient Druid Order ou de la diffusion en 1720 de son ouvrage Pantheisticon mais ils n'en apportent pas vraiment de preuves convaincantes. Jacques Brengues, quant à lui, dans "La Franc-Maçonnerie du bois" Editions du Prisme 1973, accrédite la thèse d'une F . . . M . . . du bois qui, d'opérative, serait devenue spéculative en raison de l'initiation de non-forestiers et, singulièrement, de nobles. Il cite ainsi plusieurs rituels forestiers en leur reconnaissant un caractère chrétien :
Pour plusieurs auteurs, la F . . . M . . . du bois , en raison à la fois du développement de la F . . . M . . . de la pierre avec, en particulier, le G . . . O . . . D . . . F . . . mais aussi du déclin des activités des industries forestières et, en particulier, charbonnières, serait tombée en désuétude. Pour eux, et malgré l'orthodoxisme andersonien, elle perdura et perdure toutefois dans certains rites, notamment au niveau des hauts grades : Chevalier Royal Hache ou Prince du Liban du 23ème degré du Rite de Memphis ainsi que du 22ème degré du Rite Ecossais Ancien et Accepté et du Rite de Perfection. Toujours selon ces auteurs, des tentatives d'union de ces deux F . . . M . . . eurent même lieu avec, par exemple, le Devoir des Fendeurs, corpus de Tours tandis que, plus ou moins sporadiquement, des résurgences d'une F . . . M . . . du bois ont pu être relevées, comme par exemple, Les Ventes de Roland en 1833, les Brothers fendeurs en Angleterre, le Grand Chantier Général de France régulièrement constitué en 1983 au centre des Forêts, sous les auspices de la Nature, . En France, peu après la seconde guerre mondiale, on a assisté à un essai de restauration de l'antique initiation forestière avec la création du "Chantier de la Grande Forêt des Gaules" dont les symboles majeurs étaient l'arbre, la cognée, le coin et la hache et dont l'initiation était réservée aux maîtres des degrés de la "Holy Royal Arch of Jerusalem". Cette initiative ne connut pas véritablement le succès mais, plus tard, en 1976, elle aurait présidé à la création de la Grande Loge Indépendante et Souveraine des Rites Unis (Humanitas). Plus près de nous, en 1993, le druide de la Gorsedd de Bretagne, Gwenc'hlan Le Scouëzec tenta d'instaurer un rite forestier au sein de la F . . . M . . . de pierre . En 1999, A. R. Königstein dans "Les Braises sous la Cendre", Montpeyroux, Les Gouttelettes de Rosée, prône le retour d'un carbonarisme initiatique et insurrectionnel et propose un rituel de Charbonnerie opérant un transfert vers un paganisme et se détachant de la maçonnerie traditionnelle mais refusant le recours à la violence et au terrorisme. Même si cette dernière initiative prétend renouer avec la tradition initiatique et insurrectionnelle des carbonari, il me semble que la Charbonnerie, qui a beaucoup fait parler d'elle en Europe au XIXème siècle, n'a pas de filiation avec une quelconque F . . . M . . . du bois car elle avait d'autres sujets de préoccupation que le paganisme, un ésotérisme plus ou moins druidique, la philosophie, le symbolisme. pour se consacrer à des sujets plus. explosifs! De mon point de vue, la référence à la F. . . M. . . du bois que fit la Charbonnerie ne fut qu'un alibi, conceptuel, méthodologique, organisationnel., pour, sous cette couverture légale, conduire des projets essentiellement politiques, même si, à l'évidence, par ailleurs, ils étaient portés par des valeurs humanistes, comme celle des Lumières et des Révolutionnaires du XVIIIème siècle. J'ajoute que, mais ce n'est là qu'un point de vue personnel, le souci apporté à mettre en évidence une autre tradition maçonnique que celle de la pierre, telle qu'elle était alors incarnée par les Obédiences établies, avait sa raison d'être dans le refus de la complaisance dont celles-ci pouvaient faire preuve à l'égard des autorités politiques (monarchies et empires, autrement dit. la Réaction) et religieuses (vaticanes essentiellement) quand, tout simplement, elles n'acceptaient pas d'être instrumentées par elles. Comme je l'ai dit précédemment, les historiens considèrent que la Charbonnerie est née en Italie. Dirigeons donc nos pas vers ce pays. |
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