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Abstract |
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Mon but est d'examiner: et le «roman condensé» de J. G. Balard La Foire aux atrocités, et la web-fiction Twelve blue, de Michael Joyce, en essayant d'encadrer ces deux textes, si singuliers, dans le champ, singulier, lui aussi de l'hyperfiction. «Hypertextuality is a technological rather an intellectual revolution; but as McLuhan demonstrated, the ones become the other in time» (Pickering) “La littérature nationale ne signifie maintenant plus grand chose; l'époque de la littérature mondiale est à l'ordre du jour.” (Goethe, Conversations avec Eckermann, 31 Janvier 1827) "Any culture worthy of the name loses itself in the universal. Any culture that makes itself universal loses its singularity and, gradually dies. This is the case for the cultures we have destroyed by assimilating them by force, but it is also the case for our own, in its claim to be universal. The difference is that the others have died (of) their singularity and that is a noble death whereas we are dying from the loss of all singularity, from the extermination of our values, and that is not a noble death” (Jean Baudrillard) The Global and the Universal. |
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Littérature et mondialisation | |
Le champ de la textualité, en particulier dans la pratique de l'hyperfiction est en train de changer sous l'effet des contraintes technologiques. Ce changement est visible en particulier et dans la pratique de la traduction et dans la pratique romanesque de certains écrivains contemporains. L'hybridisme culturel provoqué par les courants transnationaux a modifié presque entièrement l'idée d'une société nationale culturellement homogène. Plusieurs formes symboliques et systèmes de signification sont en voie d'être profondément réordonnés ou en phase d'importantes mutations. La culture n'existe qu'à travers les cultures. La culture ne traduit pas l'identité d'une société, l'immanence d'un système de valeurs. La culture est transcendance, distance, pacte symbolique. Quand la culture se fige comme héritage, pouvoir, appropriation, identité, image matérielle de ce pouvoir, tout est fini. Les sujets culturels sont aussi des sujets en dialogue. Ce qui est dit, l'est toujours «entre nous», ce qui suppose un espace d'interlocution, une mutualité à mettre en pratique. Être au monde signifie ni plus ni moins qu'être au centre d'une multitude de flux; voilà ce qu'il faut en conclure. C'est par là que passe le lien de la traduction et de la métamorphose réciproque. Le modèle de la traduction proposé par J. Barrrento, s'avère à mon sens, très pertinent pour repenser les rapports entre l'interculturalité et la mondialisation de la littérature. Et d'abord parce que «à partir du moment où commence à s'élargir le système rhizomatique des traductions, l'original perd son aura d'objet unique et non-répétitif: parce que le travail même de la traduction est de le rendre répétitif, et parce que cet originel-là s'altère à mesure que le réseau s'étend et que les nœuds du rhizome établissent des rapports croisés qui s'organisent selon des principes divers de connexion, d'hétérogénéité et de multiplicité» (1). Cet auteur souligne le versant “ culturaliste ” de la traduction, versant qui trouve un lieu d'élection chez Goethe, August Wilhelm Schlegel ou même Pessoa (2). Les ponts entre les cultures passent essentiellement aujourd'hui par voie de traduction. On doit à Goethe l'idée d'une Weltliteratur, une littérature mondiale. Derrière cette idée se cache l'utopie du développement d'un réseau de transactions et interactions littéraires au niveau mondial, dans un contexte qu'il entrevoit comme celui de l»'‘industrie de la culture' du capitalisme tardif» (3). Hommi Bhabha reprend le concept de «littérature mondiale» avec la triade: identité, altérité, ipséité . «L'étude de la littérature mondiale pourra devenir l'étude des façons comment les cultures se reconnaissent mutuellement à travers leurs projections de l'altérité» (Bhabha: 1994). La traduction pose le problème de la multiplication des langues. On peut voir en chaque acte de traduction d'une œuvre, le nœud du réseau de ce qu'on peut appeler une «littérature mondiale». On pourrait même dire que: «chaque traduction c'est un 'link' dans ce grand système d'hypertexte ou un lecteur actif – qu'est-ce un traducteur sinon cela même?- intervient constamment, procurant le passage à d'autres systèmes littéraires" (4). D'un autre coté, la culture «n'existe» pourrait-on dire qu'à travers la fragmentation plurielle des modes de vie et de langages spécifiques. Ulrich Beck parle volontiers du piège de la nationalité où se retrouvent pris les Etats à l'âge global. Voilà le paradoxe: «la mondialisation va de pair avec l'accentuation et le renforcement des frontières, avec l'intensification des contrôles aux frontières. Ces nouvelles frontières ne fonctionnent toutefois pas comme les anciennes. Elles ressemblent à du gruyère, car elles sont systématiquement truffées de trous et de défaillances pour leur permettre en même temps d'assurer la circulation de l'information du capital et des hommes» (5). Ce qui peut émerger en dehors du système global, ce sont les singularités qu'on ne peut voir comme une alternative à l'ordre global. «They are not subject to value judgements; so they can be either the best or he worst…They are the dispair of every would-be dominant nonothought, But they are not a monocounterthought» (6). En fin de compte, toute culture est habitée et travaillée par «cela» qui l'ouvre, d'origine, au monde, aux autres et au sens: «l'enfance» indestructible de l'art comme puissance inépuisable de création indéfiniment modalisable et modulable, «éternité diffractée en chaque instant, en chaque état, en chaque culture» , écrit “La littérature nationale ne signifie maintenant plus grand chose; l'époque de la littérature mondiale est à l'ordre du jour.”, écrit J. L. Nancy (7). Les textes sociaux – et la Littérature en est une – produisent des imaginaires, signalent des identités en construction, gênèrent des dynamiques sociales. On sait que le procès général de la globalisation se joue davantage dans les espaces périphériques ou semi-périphériques. La globalisation apparaît aujourd'hui comme une fatalité – la soumission aux orientations hégémoniques émanant des centres de décision économique et politique internationaux– et non comme une utopie – celle de parier sur la recherche d'alternatives de facette contre-hégémonique et émancipatrice. Les «communautés littéraires» sont toutes imaginaires. Soit. Mais, en matière de littérature, plus elle est locale, plus elle est universelle. En d'autres mots, "seule la littérature qui a ‘un lieu pour habiter et un nom propre» ( A local habitation and a name : Shakespeare, A Midsummer Night's Dream ), c'est-à-dire, un corps sien (de langue et d'idées ), fera appel à l'imagination de lecteurs universels " (8). Bien sûr, l'insistance sur la «pureté locale» peut bien servir comme excuse pour une reviviscence réactionnaire des anciennes formes d'oppression» (A. Dirlik, 1996: 36). On ignore pas qu'il est des formes de localisation qui s'approchent de formes de «Tiers-Mondisme». Almeida Faria, au Portugal, et dès les années 60 (Paixão) a produit une littérature du désenchantement, rélutant au cosmopolitisme, tandis qu'un autre écrivain de langue portugaise, Mia Couto ( Terra Sonâmbula , 1992) insiste dans la valeur de la tradition africaine. Donc, les textes dans un m ê me espace national, naviguent d'un pôle à l'autre. Je ne prétends pas entrer dans le débat sur la globalisation et la littérature. Il faut reconnaître la «structure inégale» (F. Braudel) de l'espace littéraire, sans tomber dans la classification des littératures dites «mineures», puisque cette dénomination a tendance à annexer la littérature à la politique, et en même temps, à en finir avec l'ethnocentrisme littéraire qui continue de déterminer le sens de la circulation des œuvres, les formes littéraires et les lieux de consécration. Tout cela est, qu'on le veuille ou non, le fruit, d'un "diktat" central. Frias Martins a raison de dire : «il importe de résister à la mondialisation pacifiste contre l'universel, décrétée au profit de ceux qui imposent toujours leurs normes au nom d'une littérature décentrée et libre » (9). |
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Notes | |
(1) João Barrento, “Literaturas em rede: tradução e globalização” in O Poço de Babel. Para uma Poética da Tradução Literária , Relógio D'Agua, 2002, pp. 123-137. (2) Ibidem p. 134. (3) Ibidem, p. 133. (4) Ibidem, p. 133. (5) Ulrich Beck, Pouvoir et contre-pouvoir à l' è re de la mondialisation, Alto Aubier, 2003, p. 178.. (6) Jean Baudrillard, «The Global and the Universal», in: (7) Jean-Luc Nancy, «Les arts se font les uns contre les autres», in Collectif Art, regard, écoute, Vincennes, PUF, 2000, p. 160. (8) João Barrento, p. cit ., p. 136. (9) Manuel Friars Martins, Globalisation, Literature AND an Iberian ‘Stone Raft', in Ciberkioske, nº 3, 2001. |
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JOSÉ AUGUSTO MOURÃO. Department of Communication Sciences, Faculty of Human and Social Sciences, New University of Lisbon, <jam@triplov.com>. |
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