Je ne sais pas si tu connaissais Karim Landais. Moi oui. Virtuellement seulement puisqu'uniquement par messagerie et téléphone. Nous étions devenus amis. Il s'est suicidé ce week-end. Je m'en veux terriblement parce que contrairement à mon habitude, je n'ai pas cherché à le contacter alors qu'il était "absent" depuis plusieurs semaines, voire mois. Habituellement, un tel silence m'inquiète et je me manifeste. Pris par mes propres soucis, je ne l'ai pas fait. Assurément, il était mal. J'aurais donc dû lui offrir ma main, mon épaule. En toute amitié, en toute fraternité. Cela ne l'aurait peut-être pas empêché de vouloir mourir mais il se serait sans doute senti moins seul, voire délaissé, oublié.
Karim était mon ami. Il a fait le choix d'être maître de sa mort. En homme libre. C'est bien la seule "chose" dont un anar veut se vouloir maître, sa mort, lui qui est sans dieu et... maître.
Je ne sais pas si tu le connaissais. Il a pas mal écrit. De façon très universitaire, très sérieusement et, en même temps, avec simplicité, générosité, envie du partage..... Ses écrits propagandistes étaient donc des travaux conséquents qu'il mettait au service de la cause.
J'ai failli à notre amitié. Je m'en veux.
Rien ne peut éteindre le remords. Du moins, de son vivant parce qu'après tout s'éteint dans le néant de la mort.
Je ne dirais pas que je suis brisé ce soir puisque je suis toujours debout. Mais, comme un sauteur, aujourd'hui, j'ai été fauché dans mon élan et je suis retombé non à terre, mais dans la douleur d'une peine qui, se rajoutant à tant d'autres, rend vraiment lourd le fardeau de la vie.
Désolé de t'ennuyer ainsi. Je ne cherche pas à partager ma peine pour m'en soulager. J'ai simplement voulu dire cette peine. Comme le signe d'au revoir que l'on fait sur le quai d'une gare à la personne qui s'en va au loin (ailleurs et donc, forcément, loin d'ici) dans le fracas du train. Sauf que ce signe est d'adieu et que je le fais dans le silence de mes larmes.
Bien frat,
JC |