Dans une chambre qu’on n’a pas encore fait sienne
s’amplifier avec la nuit
vibrer de calme et de vide
avant
de retomber, hagard, sur le chemin.
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Un
endroit provisoire où défaire
son bagage
l’apprivoiser sans
s’y attacher.
Y allumer une lumière
qu’on laissera en partant.
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Dans une chambre
la chaleur de l’après-midi
derrière les rideaux
que légèrement le vent bouge
une amie avec un livre à côté de
toi
la langueur qui te prend sur les
draps froissés.
Cette douceur des heures qui se
perdent.
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Les heures perdues ont leur
grâce.
Ni d’attente ni par défaut.
Les heures perdues pour rien.
Dans leur insondable
se sentir en paresse avec le
temps.
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Gouttes d’eau et de sel sur la
peau debout
entouré de mer le cœur battant
vagues jusqu’au récif jusqu’aux
chevilles
dans le soleil et la permanence
du lieu
entre le ciel et la transparence
du bleu
avancer le regard sans crainte
murmurer la beauté du temps qui passe.
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Ma
langue n’a pas de mot pour dire
le
bruit des feuilles dans le vent.
Goûter la plénitude de ne rien faire.
Laisser la conscience bruire
comme des feuilles dans le vent.
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Fraîche de la douche les cheveux
lâchés
tu laisses quelques gouttes sur
les draps
et ma peau.
Nous ne ferons rien que boire
ce vin de nuit
jouer à frôler nos corps à
parler à sourire
froisser les heures avec
l’ivresse.
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Tu fais glisser l’éclair de ta
robe
je vérifie l’état de la nuit
nous allons boire un
alcool léger et noir
encore nous
opacifier dans l’intime
conjurer la tristesse possible
par la chance d’une séparation
sans adieu
conjuguer nos vertiges ou les
nonchalances
fois qu’on pressent la dernière
et qu’on oublie, qu’on vit
et c’est tout.
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Tu as toujours rêvé
d’être un voyageur sans valise
de revenir les mains vides d’un
trop loin pays
à un lieu que tu joues encore à
faire
comme s’il était le tien.
Mais tu n’es pas un voyageur
et ton bagage est
toujours trop lourd.
Et encore tu pars
avec l’envie secrète
d’éparpiller en route ta valise.
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