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Naturalisme, culturalisme
humain et univers
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1 - Le naturalisme

Par naturalisme on entend la théorie selon laquelle l'être humain est déterminé depuis sa conception par son patrimoine génétique, son génotype. Ce qu'il est relève de l'inné. Pour nous naturalisme est synonyme d'innéisme biologique.

Selon l'innéisme biologique non seulement les caractéristiques physiques des individus sont déterminées par le patrimoine génétique mais encore leur comportement social tout entier. C'est l'hérédité qui crée en quelque sorte l'environnement. C'est l'hérédité qui sécrète le milieu (Cyril D. Darlington, The little universe of man, Georges Allen & Unwin, London, 1978).

C'est pourquoi les partisans de l'innéisme biologique qui souhaitent "améliorer" l'espèce humaine ne sont pas hostiles aux manipulations génétiques et aux politiques eugénistes, à l'eugénisme (De l'homme au surhomme, biologique de l'avenir, in Yves Christen, L'homme bioculturel, de la molécule à la civilisation, Editions du Rocher, Monaco/Paris, 1986, pp.152-174), c'est à dire aux politiques dites d'amélioration de l'espèce humaine.

2 - Le culturalisme

Par culturalisme nous entendons la théorie selon laquelle l'être humain est à la naissance une "page blanche" sur laquelle il écrira son histoire dans le cadre d'un environnement, d'un milieu, qu'il modèle selon sa volonté et qui le modèle. Cette théorie philosophique, encore appelée "thèse de la table rase", a notamment été développée au XVIIIème siècle par l'abbé Etienne de Condillac (1714-1780) (Etienne Bonnot abbé de Condillac: Essai sur l'origine des connaissances humaines, 2 vol., P. Mortier, Amsterdam, 1746, 1 vol., Galilée, Paris, 1975) et a influencé Rousseau et Marx.

Le dogme a trouvé son plein développement avec le léninisme. C'est par l'éducation du peuple que l'on construira la société nouvelle et donc l'homme nouveau écrit Lénine en 1917 (Vladimir Ilitch Oulianov, dit Lénine, L'Etat et la révolution, 1917, chap. II, 1).

C'est le conditionnement éducatif, nous disent les marxistes, qui conduit au bonheur terrestre, car c'est grâce à l'habitude du bon comportement social que l'on pourra vivre en définitive sans Etat, en ayant une vie naturellement correcte.

3. Naturalisme versus culturalisme et réciproquement

Faisant la synthèse des dogmes naturaliste et culturaliste certains auteurs contemporains nous disent que la querelle est sans fondement car le culturel est naturel, que "l'homme est par nature un être de culture" (notamment l'anthropologue philosophe conservateur Arnold Gehlen (1904-1976), Culture, nature et naturel in Anthropologie et psychologie sociale, PUF, Paris, 1990, pp.90-106 (Anthropologische und sozialpsychologische Untersuchungen, Rowohlt Taschenbuch Verlag GmbH, Reinbek bei Hamburg, 1986).

C'est bien, semble-t-il, le point de vue de l'épistémologue (spécialiste de l'histoire des sciences) et philosophe libéral Karl Popper (1902-1994) (Jean Baudouin, La Philosophie politique de Karl Popper, PUF, Paris, 1994.) et celui du sociobiologue Pierre Jaisson.

Karl Popper (1902-1994) a pendant toute sa vie fait la critique du totalitarisme sous toutes ses formes et s'est constamment prononcé pour la société ouverte. Pour lui "La vie cherche un monde meilleur... Notre désir, notre espoir, notre utopie sont toujours la découverte d'un monde idéal. C'est en quelque sorte inscrit en nous par une sélection darwinienne. Et il ne faut pas laisser cela de côté. Il n'est tout simplement pas vrai que nous soyons "modelés" par l'environnement. Nous recherchons un environnement (qui soit le meilleur possible) et nous le modelons, activement" (pour qu'il le soit) (Konrad Lorenz, Karl Popper, Die Zukunft ist offen, Piper Verlag , München, 1985, L'avenir est ouvert , Flammarion, Paris, 1990, p.20).

Le point de vue de Pierre Jaisson semble assez voisin; pour ce sociobiologue, il y a nécessairement une synthèse (à faire) entre les théories innéiste et environnementale, naturaliste et culturaliste. Cette nouvelle discipline scientifique montrerait "l'existence de prédispositions, issues de l'histoire évolutive des animaux comme de l'espèce humaine qui... orientent plus ou moins probablement le devenir comportemental dans telle ou telle direction. Cela ne signifie nullement que les comportements eux-mêmes soient génétiquement prédéterminés!" (Dans La Fourmi et le sociobiologiste, Odile Jacob, Paris, 1993, p. 272). Pour lui, l'être humain serait donc bien par nature un être de culture.

Selon la théorie scientifique actuellement dominante l'Univers est en évolution et l'évolution de l'Univers conduit à l'évolution des espèces vivantes et. à l'Homme. L'évolutionnisme est apparu au XIXème siècle et est issu des théories du Français Lamarck et de l'Anglais Darwin, théories qui ont fondé dans le domaine social ce que l'on appelle le lamarckisme social et le darwinisme social, la dernière forme prise par le darwinisme social étant la sociobiologie, la nouvelle science sociale fondé aux Etats-Unis en 1975.

En ce qui concerne la théorie de l'Univers, la théorie dominante, actuellement, est celle de l'évolution linéaire expansive de l'Univers. Cependant, certains scientifiques se prononcent pour une éventuelle évolution cyclique de l'Univers, et certains autres scientifiques, contestant que l'Univers soit en évolution, affirment qu'il est stable.

Selon la théorie, aujourd'hui acceptée par la majorité des scientifiques, l'Univers a connu, il y a environ 15 milliards d'années, une explosion initiale (qui pour certains est l'acte de création biblique. Selon l'historien chrétien réformé Pierre Chaunu, Histoire et foi, France-Empire, Paris, 1980, p. 279, un "événement ressemblant fort à ce que les théologiens appellent la création"), le fameux "Big bang". Depuis, l'Univers serait en expansion (Malgré cette expansion linéaire l'on pensait, encore récemment, que l'Univers était infini, puis fini. Aujourd'hui selon la cosmologie relativiste les deux possibilités sont envisagées: Jean-Pierre Luminet, Marc Lachièze-Rey, La Physique et l'infini, Flammarion, Paris, 1994; John D. Barrow, La Grande théorie, les limites d'une explication globale ultime en physique, Albin Michel, Paris, 1994, il se dilaterait et se refroidirait, il évoluerait.

Cette évolution se caractériserait par un accroissement de la complexité, une montée en puissance de la conscience.

Ainsi l'Etre humain est-il un être vivant complexe, constitué d'environ trente milliards de milliards de milliards de particules élémentaires (3x1028) et son cerveau spécifique, le néo-cortex, comporte 30 milliards de neurones et entre 600 à 1000 milliards de synapses dans un centimètre cube. (Le problème philosophique fondamental demeure, depuis toujours, le même : est-ce le cerveau qui crée la conscience (matérialisme) ou la conscience prééxistante en soi qui s'exprime par le cerveau (spiritualisme)?

Pour d'autres scientifiques, comme les astrophysiciens Jean Audouze (Jean Audouze, Michel Cassé, Jean-Claude Carrière, Conversations sur l'invisible, Belfond, Paris, 1988) et Michel Cassé (Michel Cassé, Nostalgie de la lumière, Belfond, Paris 1992 ; Du vide et de la création, Odile Jacob, Paris, 1993, idem coll. opus n°8, Paris, 1995), il est possible que, dans quelques dizaines de milliards d'années, l'expansion de l'Univers s'arrête, et qu'à l'expansion succède une contraction, suivie d'une implosion, soit terminale soit suivie d'une nouvelle expansion. Ainsi l'évolution de l'Univers ne serait pas une expansion linéaire mais une évolution cyclique, comme on le pense dans certaines civilisations traditionnelles, la civilisation hindoue par exemple.

Enfin, la théorie de l'Univers stable est, notamment, la théorie du mathématicien Luigi Fantappié (1901-1956)(Luigi Fantappié, Nuove vie per la scienza, Sansoni, Firenze, 1961), et du physicien Giuseppe Arcidiacono (Giuseppe Arcidiacono, Universo e relatività, Massimo, Milano, 1967; Relatività e cosmologia , Veschi, Roma, 1979; Relatività ed esistenza, Studium Christi, Roma, 1973; Oltre la quarta dimensione , Il Fuoco, Roma, 1980). Selon elle, l'Univers n'est pas en évolution, ni linéaire ni cyclique, il ne change pas fondamentalement, il est stable. Ce qui ne l'empêche pas de se renouveler perpétuellement, mais sans que l'on puisse parler, en ce qui le concerne, de commencement et de fin.

Cette théorie peut être comparée à la cosmologie chinoise traditionnelle qui considère que l'Univers est un immense organisme sans origine et sans cause, qui est comme il est, et qu'il serait insensé de chercher à expliquer et à comprendre mais qu'il faut essayer de décrire tel qu'il est.

 
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